16 & 17, deux espèces hors-saison au Ranch de Bango: bravo, les Canadiennes !

Ci-dessus:
à g. souïmanga pygmée, 2018 01 16 (8h50) - à d. jeune guêpier à gorge blanche, 2018 01 17 (10h40)
Ranch de Bango / Courtesy © photos par Marie O'Neill pour eBird et Ornithondar

* Ranch de Bango-

Coches bangotines surprenantes en ce mois de janvier 2018, par Marie O'NeillDiane ThériaultHélène Gauthier et Lorraine Plante, toute une équipe (féminine) canadienne en vadrouille au pays de la Teranga ornithologique*

* Voir la liste eBird de leurs observations autour du Ranch de Bango: ICI, avec des photos de Diane Thériault et Marie 0'Neill

Après demande de précisions et de documents photographiques, les observations suivantes ont été validées par l'un des réviseurs régionaux des listes eBird. Tiens, comme par hasard il s'agit de... Bram Piot (Senegal Wildlife) qui m'avait aussitôt tenu au courant de ces intéressantes données totalement hors-saison ! Marie O'Neill a gentiment accepté que ses photos ci-dessus illustrent la présente notule.

Il s'agit en l'espèce de:
  • Deux (2guêpiers à gorge blanche (merops albicollisWhite-throated Bee-eater) sur le site du Ranch de Bango le 17 janvier à 10h40 
  • Un (1) souïmanga pygmée (hedydipna platura, Pygmy Sunbird ) sur le site du Ranch de Bango le 16 janvier 2018 à 8h50

Nota:
- Guêpier à gorge blanche. Au coeur de la saison sèche sahélienne, ça ce n'est pas ordinaire ! Deux sujets de 1er hiver, peut-être plus: sur deux des photos, si l'un des oiseaux n'a aucun brin aux rectrices, l'autre en possède de tout naissants. Avec le coucou didric (chrysococccyx caprius) et le calao à bec noir (tockus nasutus), le guêpier à gorge blanche (merops albicollis) est l'une des trois espèces emblématiques de la migration inter-tropicale d'Afrique occidentale. Leur remontée annuelle vers le Sahel à la faveur des flux de la mousson ouest-africaine (qu'on appelle communément hivernage) est un spectacle régional de la nature - bien connu et précautionneusement scruté par tous les agriculteurs, en zone de contact soudano-sahélien. Pensez-donc, ces oiseaux annoncent la saison humide et longtemps invitaient les paysans à préparer leurs champs, à la montée, ou à se lancer dans les récoltes et autres fenaisons, à la descente, suivant le repli du fameux Front de convergence inter-tropical (FIT) avec ses pluies...
A Saint-Louis-du-Sénégal, en bout de bout de course de cette mousson comme de la migration saisonnière des oiseaux afrotropicaux, les guêpiers à gorge blanche sont les premiers des trois à nous rejoindre. L'arrivée massive de la troupe a lieu par ici généralement début mai - elle s'y tient en gros du 20 avril/15 mai au 1er novembre (mai-octobre pour Morel & Morel, 1990); celle des calaos reste dans le bas-delta peu évidente, celle des coucous nous parvient à la mi-juin. Cependant, des éclaireurs font leur apparition parfois dès le mois de mars. Singulièrement sur les mêmes sites année après année, les plus favorables sans doute pour tenir, alimentairement s'entend, jusqu'à l'installation de l'humidité et l'émergence consécutive des insectes ailés, prioritairement les odonates, proies préférées de Merops. Les parages du Ranch de Bango sont de ces endroits privilégiés. C'est toujours ici que l'Ornithondar a repéré ses premiers (et jeunes) chasseurs d'agrions. Mon record était d'un 16 mars mais à plusieurs reprises, plus tôt en saison, j'avais cru en deviner au loin, trop fugacement. Cette mention documentée par nos visiteurs d'outre-Atlantique le confirmerait: il n'y a pas de raison que des calaos à bec noir juvéniles et immatures vagabondent en saison sèche sur nos confins sénégalo-mauritaniens, que certains coucous didric en feraient peut-être de même dans la moyenne vallée du fleuve, et que les troisièmes larrons n'en fassent pas autant ! Ce sont des sujets juvéniles, eux aussi. A cette date, un 17 janvier, il est évident que ce ne sont en aucun cas des précurseurs d'une saison humide encore très lointaine mais bel et bien des sujets nés par ici en juillet-août 2017... Les guêpiers à gorge blanche sont réputés se reproduire et nicher "communément au moins à partir du 16°10N" durant la saison humide, "sur sols plats et sableux" (Morel & Morel in Les oiseaux de Sénégambie - cartes et notices de distribution, 1990).
L'oasis - avec ses grands arbres, et sa piscine !- que représente le Ranch de Bango est pour beaucoup dans le maintien des jeunes Merops albicollis, ici et hors-saison. Les berges du Djeuss ont d'ailleurs cette particularité de retenir des espèces en théorie absentes du Sahel en saison sèche: au village, nous avons bien eu durant quelques années une famille de barbicans à poitrine rouge (lybius dubius), avant qu'elle ne disparaisse, suite, peut-être, à un incendie de la cocoteraie; la présence saugrenue d'immatures de grands indicateurs (indicator indicator), l'apiculture locale les ayant peut-être retenus... Et des martins-chasseurs à tête grise (halcyon l. leucocephala), désormais du paysage riparien de Bango à l'année, entre Djeuss et N'Galam. Un oasis, je vous dis ! Mais pour combien de temps encore ?...

" (...) les alentours du Ranch de Bango 
où bizarrement quelques sujets sont souvent cantonnés très précocement en saison: 
les 16 mars 2016 et 27 mars 2015, par exemple ! "
- F.B. in Ornithondar 2017 05 10
En rappel sur Ornithondar:
Aux marais et alentours, ça remue, ça glousse, c'est furtif..., 2016 04 11

Ci-dessous:
guêpier à gorge blanche - merops albicollis
Ranch de Bango 2018 01 17, 10h40 / Courtesy © photo par Marie O'Neill pour eBird et Ornithondar 
- Cliquer sur les photos pour agrandir -


- Souïmanga pygmée. Un souïmanga difficile à repérer malgré l'éclat de son ventre jaune citron. Dépendant de la floraison des arbres et spécifiquement des santalales (loranthus sp.), plantes parasites des acacias et prosopis. Réputé "nicheur sédentaire en Mauritanie sahélienne" (Isenmann et al., 2010) - ce qui me laisse très perplexe, ce souïmanga étant plutôt un migrateur intra-africain nicheur de saison sèche (bien) au sud du 15°N, et dispersif vers le nord en saison humide; "répandu mais peu commun" (G. Morel, 1972) du coté sénégalais du fleuve - sans plus de précisions. L'oiseau est autrement moins observé dans notre Sahel que les souïmangas à longue queue (cinnyris pulchellus) et à poitrine rouge (chalcomitra s. senegalensis), ces derniers ayant accru leur distribution avec l'augmentation des jardins et des arbres à fleurs ornementaux. Alors qu'il est relativement commun et même saisonnièrement grégaire dans les zones soudaniennes (des souvenirs mémorables aux fenêtres de la cuisine en la paroisse Sainte Maria Goreti de Toécé, Burkina Faso !), nous avons toujours un mal fou à l'observer au nord du 15°N, au Sénégal: une seule fois dans mon jardin bordant le marigot de Djeuss, à Bango-village, c'était en août 2009, au coeur de l'hivernage (mousson ouest-africaine); et une autre fin octobre 2011, dans la brousse de Rao - les pluies finissaient à peine. Le plus souvent, il y a surtout confusion, ou incapacité à l'identifier tant l'instable remue et s'échappe; tenez, avec Bram Piot, par exemple: au Djoudj près de l'hôtel, en novembre 2016; et récemment sur la berge du fleuve Sénégal du coté de Gaya, début janvier 2018 - hélas... Le pygmée se fait discret y compris en saison humide, alors qu'il est connu pour remonter à la faveur des pluies dans le Sahel à travers le Ferlo jusqu'en Mauritanie pré-saharienne, parfois dans le Tagant et même jusqu'a l'Adrar (Insenmann et al.). C'est dire la chance de nos voisin(e)s d'outre-Atlantique... Le talent !

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