Nouvelle espèce 'chez nous' pour la liste du Sénégal - et de quelques belles obs' pour l'hiver 2023-2024 sahélisé
Prologue : l'hiver 2023-2024 ajoute un taxon à la liste IOC des oiseaux du Sénégal, dès lors riche de 689 espèces : un paléarctique pour le nord, sans oublier une deuxième donnée d'un afrotropical pour le sud (lire ci-après). Si on ne s'est pas bousculé au portillon ornithologique du pays, bisbilles politiciennes obligent, les plus téméraires ont eu l'audace récompensée, et des guides éclairés. De la cuvée, aussi : Bergeronnette de Yarrell, Engoulevent à balanciers, Monticole bleu, Sarcelle marbrée, Tadorne de Belon, Goéland dominicain, Fauvette babillarde. Et 100 Oedicnèmes criards. A la criée !
* Nord du Sénégal, hiver 2023-2024 -
Ci-dessus :
deux des trois Chevaliers bargettes (Xenus cinereus) du Gandiolais
une première pour le Sénégal !
Mouit 2024 02 3 / Courtesy @ photo John Oates pour eBird
Une espèce rejoint cet hiver la liste des oiseaux au/du Sénégal ; celle-ci provient du Paléarctique (occidental et, surtout, oriental) ; ajoutons la confirmation d'une deuxième mention d'une espèce de l'écozone afrotropicale.
- Dans notre moitié nord du pays, le Chevalier bargette (alias Bargette de Terek, Xenus cinereus, Terek Sandpiper) devient la 689e espèce de la liste sénégalaise (taxonomie de l'International Ornithological Committee, IOC), avec un total de trois (3) individus observés le 3 février 2024 par un groupe Birdquest de douze ornithos' britanniques emmenés par Nik Borrow, au seuil du parc national de la Langue de Barbarie (PNLB) sur deux vasières du Lawmar (sur le lagon, 2 ind. au nord photographiés par John Oates, 1 ind. au sud de Mouit). Un mois plus tard, le 2 mars, un petit groupe américain contacte l'individu esseulé au même endroit où il avait été découvert, "continuing foraging on mud around mangrove veg across channel", précise Nick Bonomo. Il s'agit d'une première sénégalaise, et de la seconde mention de l'espèce au nez retroussé dans l'Afrique occidentale stricto sensu, après celle du 19 décembre 1974 en basse Gambie (avec photo, obs. J. & K., in Morel, G. J. & Morel, M-Y.). Historiquement cependant, dans la région élargie du nord-ouest africain deux observations proviennent aussi du Maroc (in Thévenot et al.) et, à trois reprises, du parc national du Banc d'Arguin (PNBA), en Mauritanie : un (1) individu le 7 décembre 1984 (obs. Hazevoet), un (1) autre avec bague colorée le 11 janvier 2000 (obs. Hagemeijer et al.), un (1) individu le 20 janvier 2001 (obs. C. Smith, in Paul Isenmann et al., 2010). Les oiseaux occasionnels en Europe de l'ouest et les accidentels sus-cités sont probablement originaires des marges occidentales de l'aire de distribution euro-asiatique, essentiellement russe, de l'espèce : pays baltes et région finlandaise d'Oulu sur le golfe de Botnie. Le stationnement hivernal de l'immense majorité des Chevaliers bargettes se fera donc sur le pourtour de l'Océan indien ; pour notre continent, de Djibouti à l'Afrique du sud, ponctuellement sur la façade atlantique et de façon décroissante de la Namibie au Cameroun.
- Dans la moitié sud du pays, l'Hirondelle de Preuss (Petrochelidon preussi, Preuss's Cliff Swallow), déjà mentionnée en Casamance par Bruno Bargain, "il y a deux ou trois ans" me signale Bram Piot, est photographiée le 4 février 2024 par Patrick Monney à l'orée occidentale du parc national du Niokolo Koba (PNNK), au campement de Wassadou, connu des ornithos' pour ses surprises aviaires. Jusqu'à deux (2) individus sont ensuite contactés sur le même spot par le décidément heureux groupe Birdquest de Nik Borrow, les 9 et 10 février 2024 à la verticale du fleuve Gambie. Dans la région, l'Hirondelle de Preuss est relativement bien distribuée en Guinée Bissau et, plus loin, en Sierra Leone.
De la problématique HIRONDELLE A VENTRE ROUX dans notre nord-
- Par courtoisie, j'ai récemment rétrogradé notre première septentrionale d'une Hirondelle à ventre roux d'Afrique de l'Ouest (Cecropis semifura ssp. gordoni, G. Caucal & F. Bacuez, Toddé 21/01/2020) à une déshonorante (lol) seconde place chronologique après avoir découvert un apport tardif sur eBird d'une mention d'Observation.org, de trois (3) individus observés le 11 décembre 2016 par Johannes Jansen, sur le Lawmar du parc national de la Langue de Barbarie (PNLB). Cette espèce du biome guinéen est "uncommon to fairly common" (in Borrow-Demey) en saison humide dans l'Afrique des savanes. Elle est visuellement fort délicate à identifier sans documentation, et nombre de contacts hors zone de répartition reconnue (cf. carte ci-après) peuvent prétendre à la contestation tant les Hirondelle des mosquées (Cecropis s. senegalensis), H. (rousseline) ouest-africaine (Cecropis daurica domicella - bientôt sur Ornithondar) et H. rousseline (Cecropis daurica rufula) sont ressemblantes. C'est ainsi que les données même des meilleurs d'entre les ornithos' peuvent finir 'cachées' (ou reléguées) faute de documentation : ainsi de celle faite par mon co-découvreur sus-cité de l'espèce dans notre septentrion, Gabi avec sa mention de deux (2) ind. sur la digue-piste de Bango, le 9 janvier 2024. Ou, plus invraisemblable, la mention non chiffrée (!?) de l'espèce au gîte d'étape de Richard-Toll, le 30/01, seul trouble d'un groupe de douze personnes qui a pourtant et justement mérité, par ailleurs, la palme des plus grands succès ornithos' de cet hiver 2023-2024...
Hormis les trois premières Bargettes de Terek - et donc issues du Paléarctique-, pas de limicole(s) accidentel(s) du Néarctique cet hiver, sur la Grande Côte septentrionale et son estuaire sénégalais.
- Faute d'ornithos hors des sentiers battus sur leurs terres du Ndiaël et d'au-delà les Trois-Marigots jusqu'aux lointains du Ferlo, les seuls Courvites isabelles (Cursorius c. cursor) ont été contactés dans le parc national du Djoudj (PNOD, 24/12/2023-15/03/2024) et sur l'incontournable périmètre très facile d'accès, hélas pas des plus beaux spots de la région, de l'aérodrome de Richard-Toll (1 à 5 ind., 9/01/2024 obs. Sam Woods et al.). En rappel, après Triplet & Yésou (12/01/1994), Ornithondar et ses camarades avaient documenté à la fois de nouvelles preuves de nidification dans notre bassin sénégalais et une dispersion juvénile au-delà des limites sud connues de la reproduction de l'espèce : poussin et parents près de la mare Koné, en juin (2016) derrière les Trois-Marigots ; jeunes Courvites isabelles en compagnie de cousins de Temminck, toujours en juin (de la même année) dans l'arrière-pays du Gandiolais.
Record d'Oedicnèmes criards, de 70 à 100 hivernants
fin février sur leur spot de Richard-Toll
- Record numérique pour un limicole du Paléarctique, cet hiver : un bel effectif d'Oedicnèmes criards (Burhinus o. oedicnemus) a stationné aux alentours de l'aérodrome de Richard-Toll, ça devient une habitude, au moins du 15 janvier au 12 mars. Mieux, certains observateurs ont estimé leur nombre à une centaine (100) d'individus, le 22/02 ; à soixante-dix (70) le 27/02. Déjà, onze (11) puis quatorze (14) sujets y avaient été dénombrés les 10 et 12/01. L'hiver 2022-2023 (7/11-12/02) avait donné quelque quarante (40) oiseaux sur ce site désormais le plus réputé de notre région pour y cocher l'échassier, en limite sud de sa distribution hivernale, aux côtés de ses cousins subsahariens locaux, les Oedicnèmes du Sénégal et O. tachard (>20 ind. de ce dernier le 1/02). L'équipée de Nik Borrow se distingue encore avec trois (3) Oedicnèmes criards contactés en bordure du PNOD le 2/02. Une (1) donnée solitaire au Diawling mauritanien (PND, 6/12/2023 par le Sounding Wild) restera pour nous unconfirmed, en l'état actuel.
OISEAUX D'EAU - merci le Djoudj !-
Faute d'accès aux dénombrements des oiseaux d'eau de la mi-janvier, c'est secret defense au Sénégal (l'opacité sub-saharienne cachant malheureusement bien d'autres biais), on se réfèrera aux listes des sites participatifs :
- Encore un décompte élevé d'une espèce bien connue des Européens mais autrement plus localisée sous nos latitudes : quatre vingt-dix (90) Gallinules poules-d'eau (Gallinula chloropus ssp.) sur le Djoudj le 1er mars, Javier Train Garcia est un birder consciencieux. Dans notre vallée du fleuve Sénégal, les petits effectifs de la sous-espèce meridionalis ("smaller than nominate, with slaty blue-grey upperwing-coverts but without the olive wash", in BOW) sont rejoints en hiver par des sujets de la race nominale.
Chez les Anatidés, les longues vues patientes et méticuleuses ont pu déceler au milieu des classiques dendrocygnes, Sarcelles d'été, Canards pilets et souchets qui reposent par dizaines de milliers sur le célèbre Grand Lac du PNOD :
- trois (3) Tadornes de Belon (Tadorna tadorna) le 25 décembre 2023. L'espèce est loin d'être annuelle au Sénégal, et ses mentions sont (quasi) toutes 'géolocalisées' du Djoudj : hiver 1973-1974 (7 à 9 ind.) ; février 1990 (2 ind.) ; janvier 1996 (15 ind.) et 1997 (1 ind.) ; hiver 2017-2018 (8 ind., PNOD sénégalais et PND mauritanien) ; février 2022 (2 ind.). L'hiver 2017-2018 avait connu un petit afflux permettant à nos amis dakarois de réaliser les premières mentions du palmipède dans la péninsule et ses environs (Technopôle, lagon de Yenne-Toddé - on lira les notules afférentes de Bram Piot : ICI sur SenegalWildlife). Pour le plaisir, la mention la plus méridionale du gros canard nous provient d'un comptage exhaustif sur les rizières littorales de Khoni Benki, en Guinée (5 ind. le 23/01/2006).
- de trois (3) à quinze (15) Marmaronettes marbrées (ex Sarcelle marbrée, Marmaronetta angustirostris) ont été notées entre le 6/12/2023 et le 29/02/2024. A la différence du tadorne, le petit canard méditerranéen, le plus rare du Paléarctique (Quasi-menacé/NT sur la Liste rouge de l'UICN), n'a au Sénégal jamais été rapporté au-delà du bas-delta (parc national du Djoudj et mare dite de Ross-Bethio). Il y est cependant (plus) régulier dans le temps, mais le nombre de ses hivernants est très fluctuant d'un hiver l'autre, avec des maxima de 33 ind. pour l'Ornithondar en février 2014, et jusqu'à >150 ind. observés par le photographe animalier Thomas Blanchon les 30/11 et 1/12/2021 sur le lac de Khar (PNOD). L'hiver 2023-2024 restera donc un cru de moyenne facture.
PELAGIQUES-
- Avant le périple de son groupe au pays de la Teranga, Nick Bonomo m'avait demandé quelques infos sur les meilleurs spots à Goéland brun et Sterne d'Afrique - "any reliable sites for large gull roosts around St L?". J'avais oublié de lui répondre que l'influenza aviaire, qui continue son oeuvre dévastatrice dans une non-médiatisation générale, avait décimé spécifiquement le "stock" de Thalasseus albididorsalis, ces deux dernières années. Belle compensation avec plus d'une trentaine (32) d'Océanites tempête (Hydrobates pelagicus ssp.) "(...) foraging in the surf at the beach (...)", le 2 mars. Quatre (4) individus seront observés près de la côte à Mboro-plage le 16 mars (obs. Birding the Strait). Autres pélagiques au contact continental, quelques Labbes parasites (Stercorarius parasiticus) sont aperçus à l'unité, le 2/03 en plusieurs points de la Langue de Barbarie, deux individus le 16/03 sur la grande Côte de Mboro. Les coups de vent générant de puissantes houles sont généralement à l'origine de ces observations autrement plus compliquées par ici qu'à Dakar (Mecque de l'ornithologie pélagique s'il en est), configuration de notre géographie oblige. En cas de tempête cependant, certains de ces oiseaux (océanites, labbes, Fous de Bassan) cherchent alors refuge derrière le cordon littoral, profitant de la brèche pour trouver pitance et tranquillité dans l'embouchure du fleuve, à l'abri des turbulences.
- Des observations de Laridés cet hiver, on retiendra celle d'un (1) Goéland dominicain (Larus dominicanus ssp.), le 13 janvier 2024 (obs. José Martin et al.) au droit du campement touristique Le Zébrabar (PNLB). Ce goéland typique de l'hémisphère sud (Holantarctique, cônes austraux de l'Afrique et de l'Amérique latine) est bien plus irrégulier sur la Grande Côte sénégalaise que dans le Sine Saloum - où il a même niché en 1983.
RAPACES-
- Comme à l'accoutumée, cinq de nos huit Vulturidés 'officiels' (Vautour charognard, Vautour africain, Vautour de Rüppell, Vautour oricou, Vautour fauve) ont été régulièrement observés dans le Djolof, dans le triangle Darou Mousty-Mekhé-Mpal et l'axe Bargue-Kebemer via la R30 (peut-être sensiblement moins dans la région de Louga qu'auparavant). Les effectifs hivernants du Vautour fauve (Gyps f. fulvus) ont été faibles, avec un maximum rapporté de douze (12) sujets ensemble au nord de Louga, le 22 février. Les ravages de l'Influenza aviaire sur la reproduction européenne 2022 (notamment française) y sont sans doute pour beaucoup - les hivernants au Sahel étant majoritairement des juvéniles. Même si à moyenne échéance les conditions sécuritaires, alimentaires et climatiques de plus en plus favorables à l'espèce dans le Paléarctique ont toute chance de les retenir au nord de l'Afrique. D'autres vautours sub-sahariens (un Rüppell dans la Drome française en décembre, par exemple !) savent désormais que l'herbe est plus verte par là-bas qu'au pays...
- L'Ornithondar est une fois encore rassuré d'apprendre, Dieu est grand, que l'une des dernières voire l'ultime paire de l'Aigle ravisseur (Aquila rapax belisarius, North African/Abyssinian Tawny Eagle) encore 'opérationnelle' dans les moyenne et basse vallées du fleuve côté sénégalais conserve son territoire dans la zone de Ndioum (obs. V. Brlík du 30/01/2024) - où nous avions été les premiers depuis longtemps à avoir documenté une aire occupée, en décembre 2015. Et dire que l'espèce fut le grand rapace le plus commun de notre région, jusque les années '70 du XXe siècle écocidaire...
- Comme chacun le sait depuis Thiollay (et se rend vite à l'évidence en visitant la bande sahélienne, enfin celle qui peut encore être parcourue sans risques), le rapace, j'entends l'afrotropical d'abord, n'est pas ce qu'on rencontre le plus fréquemment dans le septentrion sénégalais. Eradication des habitats, des arbres et des proies, dénichage et persécution ont eu raison d'espèces finalement en incapacité de se reproduire et donc de se perpétuer - c'est aussi simple que cela ; à moins de hisser son nid au plus haut d'une ligne à haute tension... Des espèces encore banales aux temps des Morel (années '60-70), on sera heureux de savoir que survivent en 2023-2024, en tout cas dans la moyenne vallée entre Richard-Toll et l'île à Morphil (au-delà c'est 'zone rouge' et terra incognita depuis des décennies pour la connaissance des oiseaux), quelques Autours gabar (Micronisus gabar ssp. niger) et (deux ?) adultes du Gymnogène d'Afrique de l'Ouest (Polyboroides typus ssp. pectoralis, West African Harrier-Hawk). Je ne voudrais pas décourager le lecteur - et nos visiteurs enthousiastes...- mais après avoir dévasté le Vivant de la basse vallée, les riz tricolores colonisent désormais la moyenne vallée en toute déraison écocidaire, sans frein aucun, encore moins chimique, même pas les contraintes climatologiques et le Sahara à quelques dizaines de kilomètres ; et ce sont les vieilles gonakeraies réchappées des sécheresses qui ne s'en remettront pas, cette fois ; avec leurs oiseaux. Un jour, trop tard, la compilation des images satellitaires au fil des ans servira de preuve irréfutable, peut-être, aux tribunaux de l'écocide mondialisé. On ne savait pas, se justifieront-ils, imitant notre cynique Narcisse-actuel-à-nous.
- Un seul (1) immature d'Aigle de Bonelli (Aquila f. fasciata) a été rapporté, les 24 et 25 décembre 2023 dans le parc national du Djoudj (PNOD). Il nous semble que l'espèce est nettement moins contactée qu'il y a quelques années, dans la basse vallée du Sénégal. Il faut dire que l'arc-de-cercle fréquenté majoritairement par de jeunes sujets lors de leur visite hivernale, partant de la plaine de dé/crue à hauteur de Diama pour rejoindre les Trois-Marigots avant de remonter vers le Ndiaël, n'est pas très couru par nos camarades - on dira ça. Pour ne pas s'inquiéter des dévastations environnementales autour de ses sites sénégalais de stationnement ; ou des toujours trop nombreuses électrocutions (qui persistent) dans le sud-ouest marocain.
- A l'évidence pas d'afflux du Hibou des marais (Asio f. flammeus) dans les vallées du fleuve Sénégal, cet hiver.
TARGETS & CRYPTIQUES-
- L'Engoulevent doré (Caprimulgus eximius ssp. simplicior, Zinder Golden Nightjar) est depuis quelques années (et pour ne pas laisser l'exclusivité au seul Maroc saharien...) 'the target' septentrionale pour tout périple ornitho' abouti. 2023-2024 ne déroge pas à la règle, d'autant qu'après quelques années de déceptions sur le devenu classique Diatar track, dues au saccage environnemental de rigueur, Progrès oblige, les oiseaux y ont retrouvé quelques reposoirs, ici et là et plus loin sur le chemin préféré des guides ornithologiques. L'Engoulevent doré n'est pas une rareté, loin s'en faut : nous avons été étonnés, en prospectant nuitamment avec mon ami le photographe animalier J. Calvo, par le nombre d'envols nocturnes dans les cordons du Tooro séparant diéri et plateau du Ferlo. Cet hiver, il a été contacté jusqu'à Matam (obs. B. Brlík du 29/01/2024). A noter une probable extension de sa distribution dans le Djolof de la Grande Côte : trouvé par Bram Piot vers Lompoul en novembre 2016, et par un groupe d'Espagnols au sud de Saqata (N3) en janvier 2022. Autrement plus aléatoire et probablement hivernant irrégulier (sur des biotopes d'accueil bien différents, très ciblés), l'Engoulevent du désert (ex d'Egypte ssp. du Sahara, Caprimulgus aegyptius ssp. saharae) n'a pas été débusqué en cette saison 2023-2024 - en tout cas l'Ornithondar n'en a pas eu vent. En revanche, un (1) Engoulevent à balanciers (Caprimulgus longipennis) a été trouvé et joliment photographié le 1er février 2024 par Nik Borrow et al. dans le périmètre... de l'aérodrome de Richard-Toll. Sans ses pennes, bien entendu, l'afrotropical du coup moins spectaculaire remontant vers notre nord à la faveur de la saison humide après la reproduction dans le biome soudanien - peut-être du juvénile aventureux. A l'évidence pour un hiver plus durable que prévu dans nos vallées...
- Du Pic gris (Dendropicos elachus), mes innombrables lecteurs (lol) savent qu'il est incontestablement mon chouchou ! Ce qu'on sait moins, c'est que l'oiseau (comme le Renard pâle chez les mammifères) est l'une des espèces des moins documentées du Sahel (cf. ci-dessous, une statistique eBird par exemple), et donc du monde. Cet hiver, les voyageurs ornithos' confirment sa bonne présence dans la moyenne vallée du fleuve. En revanche dans le bas-delta, il faudrait s'écarter de la N2 pour accéder à ses sites de fréquentation, autrement plus morcelés, l'absence de boisement adéquat y limitant les possibilités de rencontre. Un contact sonore dans mon fief de l'arrière-pays de Gandiole (où je suis un couple du pic depuis des années) par le camarade G. Caucal, le 11 janvier 2024.
Ci-dessous :
données eBird de Dendropicos elachus pour toute sa zone de répartition africaine,
de g. à d., observations-avec photos-avec audio, au 3 mai 2024 !
/ @ eBird and Macaulay Library
- On oublie trop souvent par ici que l'Outarde de Savile (Lophotis savilei) n'est pas commune, mais bel et bien une espèce localisée, à la distribution fragmentée et au caractère fort discret hors la saison des parades nuptiales, loin d'être 'accessible' dans la bande sahélo-soudanienne de la Mauritanie au Soudan comme elle le demeure (encore) dans notre recoin saint-louisien et au-delà dans son bastion sahélo-soudanien du Sénégal. La majorité des observations a eu lieu dans les Trois-Marigots hélas bien dégradés, singulièrement et scandaleusement sur les périmètres de ladite outarde. Heureusement les 'experts' avec leur "meilleur ornithologue du Sénégal" veillent au grain avec brochure-pour-chasseurs-ou-étudiants-urbains et distributions de petits xalis éco-gestionnaires - on ne rit pas, sauf Mamadou & Co ! Quant à l'Outarde arabe (Ardeotis arabs ssp. stieberi, Great Arabian Bustard), on en restera cet hiver à trois (3) individus observés de concert en mars 2024 dans leur réduit de l'assiégé et pourtant minuscule parc national du Djoudj. Malgré les contacts possibles qui m'ont été rapportés hors et parfois loin de son ultime bastion du PNOD, et ma rencontre inespérée d'un sujet peut-être mauritanien dans la forêt de Maka Diama au dernier jour de l'hiver 2022-2023, l'avenir est sombre pour la race dans l'ouest africain (l'espèce étant classée Quasi menacée/NT au niveau mondial sur la Liste rouge de l'UICN).
- Le Turnix à ailes blanches (alias T. de Meiffren, Ortyxelos meiffrenii, voir un sympathique récit de Bram Piot sur SenegalWildlife) est devenu pour le centre du pays et son bassin arachidier ensablé ce qu'est l'Engoulevent doré pour notre rivage (Sahel, en arabe) : l'autre target des groupes ornithos' en virée sénégalaise. Cet hiver vient renforcer l'attrait du lutin, par de superbes photographies mais aussi et surtout par une vidéo qui, outre la démarche de caméléon de l'oiseau enregistre le 4 février 2024, c'est à notre connaissance une première, sa voix ronronnante... d'engoulevent. L'Ornithondar se joint à Bram Piot et xeno-canto pour louer la performance de Javier Train Garcia*, sur tous les fronts de la documentation de terrain - et rendre grâce à l'émérite Carlitos sans lequel la prise n'aurait vraisemblablement pas pu se faire ! Ce turnix, qui était observé jusqu'aux années '70 dans tout le septentrion y compris le Ferlo (in Morel & Morel), n'a depuis plus jamais été formellement aperçu dans la région nordique qui nous intéresse. Gabi Caucal l'aurait pourtant coché dans le Diawling mauritanien en janvier 2024, mais nous aimerions confirmation. Je me suis personnellement emballé au pied du champ de tir militaire de Toddé en levant quelques secondes un turnix autour des années 2010 - qui s'avèrerait plutôt un T. d'Andalousie tant le milieu n'est pas favorable au T. à ailes blanches (lire ci-après).
* Javier Train, XC881227. Accessible at www.xeno-canto.org/881227.
" Le plus souvent silencieux,
on lui attribue cependant un sifflement grave. "
- Présentation de O. meiffreinii par Merlin & eBird
Ci-après :
1ère capture sonore connue de Ortyxelos meiffrenii !
/ Près de Tip 2024 02 4, @ Javier Train Garcia pour xeno-canto
Ci-dessous :
statistiques eBird des données de Ortyxelos meiffrenii pour le Sénégal
/ @ eBird and Macaulay Library
données eBird de Turnix sylvaticus lepurana dans le département de Saint-Louis, nord du Sénégal
- Le Turnix mugissant (alias Turnix d'Andalousie, Turnix sylvaticus ssp. lepurana, West African Button-Quail) n'est pas une 'cible' aussi convoitée (distribution plus vaste oblige) que son cousin à ailes blanches. Paradoxalement, le Turnix mugissant/d'Andalousie/d'Afrique de l'Ouest (!) est plus difficile à débusquer qu'Ortyxelos meiffrenii car il affectionne des terrains abondamment enherbés et broussailleux, volontiers en pied de cordon dunaire ; c'était le cas pour mon sujet de Toddé sus-cité. A la vérité il y a peu de mentions du taxon dans notre nord, huit sur eBird : avec cet hiver deux données, un (1) ind. le 9/01, deux (2) le 3/02/2024 rapportés des steppes du Gorom, dans le parc national du Djoudj (PNOD) ; observations exceptionnellement à découvert auxquelles on pourrait ajouter une magnifique rencontre antérieure (avec photo), qui n'est malheureusement pas sur la plateforme, par mes camarades A. & D. Mignot, dans la plaine de dé/crue du fleuve près de la digue de délestage.
- Cratérope fauve (Argya fulva ssp. buchanani, South-western Fulvous Chatterer), avec des groupes familiaux de 7-15 individus, Spiloptile à front écaillé (Spiloptila clamans) dans son biotope de Leptadenia pyrotechnica, Rémiz du Soudan (Anthoscopus punctifrons), Prinia aquatique (Prinia fluviatilis) et Tarier d'Afrique (Saxicola torquatus ssp. moptanus, African Stonechat) ont été au rendez-vous des birders et autres cocheurs des spécialités locales - qui ne sont pas pour autant des endémiques ou quasi-endémiques, il faut quand même le rappeler. Le dernier nous semble de plus en plus localisé, à l'évidence très 'perturbé', c'est le moins qu'on puisse dire, par les effarants chamboulements agraires dans le paysage traditionnel du bas-Sénégal.
- la petite colonie du Martinet horus (Apus horus) que SenegalWildlife et Ornithondar avaient découverte sur le Doué de Lérabé en janvier 2018, faisant de l'espèce la 676e de la liste sénégalaise, est devenue une destination ornithotouristique incontournable pour toute pérégrination réussie dans ce lointain septentrion. Les décomptes initiaux de 2018 et 2019, avec un nombre record de 58 individus le 15/12/2019 (obs. F. Bacuez), n'ont jamais été retrouvés depuis : cette année, un maximum de cinq à onze (5-11) individus a été rapporté du spot (par exemple le 3 janvier, obs. Sam Woods et groupe). Depuis sa découverte, l'espèce y a été contactée au moins d'octobre à avril. Il restera donc à savoir si les Horus y sont résidents à l'année ou pas; et si la précarité de leur talus n'incite pas des martinets à coloniser d'autres berges le long du défluent voire des sites régionaux et transfrontaliers encore insoupçonnés.
PASSEREAUX de l'hiver tropicalisé-
Seconde donnée sub-saharienne
de la Bergeronnette de Yarell :
une Britannique par un sujet de sa Majesté, cela allait de soi !
- Une (1) femelle de Bergeronnette (grise) de Yarrell (Motacilla alba ssp. yarrellii, British White Wagtail) a été découverte dans la région de Podor par Nik Borrow et son groupe début février 2024. Nik signale qu'il s'agit de la "2nd subsaharan record" de cette race très noirâtre des îles britanniques. Well done !
- Pas de Monticole de roche (Monticola saxatilis) documenté, cet hiver (présence de novembre à mars, alors qu'un mâle en plumage d'éclipse avait été contacté à la veille du printemps dernier, le 19 mars 2023, sur la digue de Tylla dans les Trois-Marigots). En revanche, les bienheureux de Nik Borrow ont observé (sans précision de sexe) un (1) Monticole bleu (Monticola s. solitarius) le 1er février 2024 aux alentours de Richard-Toll. Si les deux espèces sont répandues en hiver le long de la Rift Valley (Ethiopie, Kenya, nord Tanzanie), leur séjour (ou le transit) sahélien est depuis toujours peu significatif, très localisé. Il faut aller du côté des falaises littorales de Toubab Dialaw et Popenguine pour être quasi assuré de les y trouver, en tout cas le merle bleu (longue présence d'octobre à début avril).
- Traquet de Seebohm (Oenanthe seebohmi, Atlas Wheatear) et, j'imagine, Traquet motteux du Groenland (Oenanthe oenanthe ssp. leucorhoa, Greenland Northern Wheatear) ont été tous deux logiquement rapportés de la Moyenne vallée du fleuve, entre Richard-Toll et Ndioum. Fidèle à son promontoire de Lérabé : un traquet atlasique se tient hiver après hiver sur la falaise de limon durci qui surplombe les terriers des Martinets horus du Doué !
- Une (1) Hypolaïs pâle (Iduna pallida ssp.) dans les brousses de Toddé le 10 janvier 2024 (obs. G. Caucal, avec L. S.), lors de sa vaine tentative d'y retrouver nos cinq Jacanas nains d'il y a un an ; trois (3) Pouillots ibériques (Phylloscopus ibericus ssp.) les 1er et 3/02 puis le 15/03/2024. Toujours peu de données de la Fauvette à lunettes (Curruca c. conspicillata), la plus commune des fauvettes régulières rares, avec un (1) seul sujet contacté le 23 février dans le PNOD par un groupe d'Espagnols, habitués de l'espèce au pays ; une (1) Fauvette de Moltoni (Curruca subalpina) mais pas par Bram (!), avec les premiers Pouillots fitis de la migration prénuptiale, le 17 mars 2024 à Richard-Toll (obs. R. Baxter) ; tandis qu'une (1) Fauvette babillarde (Curruca c. curruca) est observée le 5 février dans l'attractif bush arbustif de Mourkadié. A noter qu'un sujet de cette dernière a été formellement identifié le 30 janvier dans le sud du pays, à Ndiaffate-Kousmar (obs. V. Perrin). Aucune Fauvette mélanocéphale repérée. Faute de photographies (ou de sonagramme), et malgré l'expérience des observateurs, on restera prudent sur certaines mentions sus-citées tant les espèces sont délicates à identifier avec certitude.
PRUDENCE PRUDENCE...
Comme chaque hiver, et n'y trouvez rien d'anormal ou de scandaleux, c'est la foire aux choucadors, aux pics, aux souimangas et à quelques autres espèces, mal ou trop laborieusement décrites voire inconnues du nord sahélien (à tout le moins des zones sénégalaises où elles sont listées). Pensée amicale pour le lointain réviseur 'national' des listes saisonnières... Comme quoi, il n'y a pas que JMD et son prévertien Face-de-bouc, dans le saisissement ornitho' - le tout est d'accepter apprendre ; de nos jours, là comme en tant d'autres domaines, le nombril sourcilleux est roi, et à tous les âges ; moi-je-sais, ex abrupto !
VRAISEMBLABLE :
- si la famille des souimangas se trouve fort réduite dans le Sahel stricto sensu (trois espèces), les incursions vers notre région, notamment par la Grande Côte, sont connues pour au moins une espèce : le Souimanga à ventre jaune (Cinnyris v. venustus), à l'évidence installé à Louga depuis plusieurs années au vu de la répétition annuelle des mentions dans cette ville. Noté le 14/01 du Gandiolais (juvénile à Niébène, par H. Chavez), le 10/01 de l'aérodrome de Richard-Toll avec un Souimanga pygmée - la proximité très 'garden' du complexe résidentiel de la CSS y est sans doute pour beaucoup ; et le 11/01 jusqu'à Ouro-Madiou, près de Podor, dans la moyenne vallée. Des mouvements post-reproduction vers les marges sahéliennes sont encore mal appréhendés mais avérés. Ne jamais oublier néanmoins qu'en cette période, l'extrême variabilité des plumages du Souimanga à longue queue (mâles post ou pré nuptiaux, immatures) peut induire en erreur le visiteur peu rompu à ces costumes dépenaillés - nous l'avons déjà vérifié.
CASSE-TÊTE :
- le Circaète de Beaudouin, cousin sub-saharien très proche du paléarctique Circaète Jean-le-Blanc (duquel il est parfois considéré une sous-espèce) est un rapace de la bande des savanes principalement d'Afrique occidentale et centrale, avec de récurrentes mentions des Rwanda, Ouganda, Ethiopie et ouest Kenya. Dans le nord du Sénégal, les cinq (5) mentions que j'ai pu rassemblées sont évidemment recevables mais pas incontestables, même avec photos ! Lesquelles s'avèrent des timbres-poste, ou d'un angle de l'oiseau le moins probant (de dos), ou agrémenté d'un commentaire insuffisant - "muy blanca !". Car des Circaètes JLB très blancs, ça existe aussi, voilà le problème, y compris avec des sous-alaires peu ou quasiment pas striées. Trois des cinq données proviennent des abords de la route nationale à hauteur du Ndiaël où justement il y a une bonne présence du Circaète européen, en hiver ; et où nous avons pu voir des sujets particulièrement clairs, plusieurs années de suite, qui n'étaient pas... de Beaudouin.
PEUT-ÊTRE :
- le 'Pic cardinal' est plus hasardeux. L'espèce n'était pas reconnue au nord du 15° par les Morel. Cependant, l'augmentation des mentions ces dernières années y compris par des ornithologues aguerris, notamment dans la moyenne vallée (Mourkadié, Keur Mbaye), et par de nombreux birders en simultané, pose question. Le regain des pluies depuis une bonne décennie aurait-il permis un retour (ou une arrivée locale) de l'espèce sur les marges sénégalo-mauritaniennes ?
- des choucadors de toutes espèces sont rapportés avant effacement des copies corrigées. De celles-ci, le 'Choucador de Swainson' est la moins invraisemblable bien que la lumière violente joue absolument contre une 'expertise' définitive. Comme à Lérabé le 11/01/2024 - permettons ma circonspection. L'observation convaincante de vingt (20) ind. dans la vallée fossile du Ferlo en saison humide (28/07/2022) par Paul Insua montre combien la période qui va de juillet à novembre-décembre peut nous jouer des tours, avec la remontée du Front Inter-Tropical (FIT) et dans son sillage des oiseaux sudistes en mal d'explorations. Quant aux mentions du 'Choucador pourpré' dans la basse comme la moyenne vallée, à plusieurs reprises par les mêmes visiteurs, je n'y souscris pas ; pas de description, pas de document ; le classique et local Choucador à oreillons bleus est l'étrange absent de leurs listes de Lamprotornis, tiens tiens ! Avis au valideur...
CONTRARIANT :
- un 'Aigle de Wahlberg' observé près de Richard-Toll le 25/01/2024 par un connaisseur de l'espèce dans son propre pays, l'Afrique du Sud (et dieux savent que certains sud'afs' sont des meilleurs ornithos panafricains) aurait pu être un Aigle botté, qu'il a cependant chez lui en hiver et en résidence, de je ne sais quel morphe ("Could be confused with either pale or dark morph of Booted Eagle", in Birds of East Africa, T. Stevenson & J. Fanshawe). Très peu de données fiables dans notre nord-ouest, a fortiori à cette période - voilà le hic, fin janvier quand même... J'ai à mon actif une ou deux obs. lointaines du même type, de pleine saison humide, que je n'ai plus retenues dans ma collection personnelle (en apprenant à perdre de l'enthousiasme trop facile, et des certitudes expéditives plus proches de la croyance que de la science, haha !).
NON :
- la 'Buse variable' du 8/01/2024 à Mourkadié, pourtant "non catégorique" pour le guide de Tropical Birding, a été sur eBird redirigée vers Buteo sp. Pas impossible mais faute de preuves indubitables, la Buse féroce ou tout autre rapace du même jizz aurait pu faire l'affaire.
- les six (6) ind. de l''Astrild à joues orange' le 6/12/2023 dans les environs du Grand Lac (PNOD) sont à mon avis, sauf documentation, des sujets de l'Astrild cendré.
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* Voir aussi ces deux rapports de voyage (hiver 2024) :
- de Nik Borrow pour Birdquest : ICI
- de Sam Woods pour Tropical Birding : ICI
Ressources :
* Borrow, N & Demey, R. (2023), Birds of Senegal and The Gambia, second edition, Editions Helm, Londres, p. 136 et 226
* Taylor, D. & Message, S. (2006), Guide des limicoles d'Europe, d'Asie et d'Amérique du Nord, Editions Delachaux & Niestlé
* Morel, G. J. & Morel, M.-Y. (1990), Les oiseaux de Sénégambie - notices et cartes de distribution, Editions de l'ORSTOM, Paris
* Isenmann, P. et al. (2010), Oiseaux de Mauritanie - Birds of Mauritania, Société d'Etudes Ornithologiques de France, Muséum National d'Histoire Naturelle, Paris
* Bergier, P., Thévenot, M., Qninba, A., Houllier, J.-R. (2022), Oiseaux du Maroc - Birds of Morocco, Société d'Etudes Ornithologiques de France (SEOF), Muséum d'Histoire Naturelle, Paris
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