Hirondelle à ventre roux : une première pour le nord du Sénégal - rétrogradée finalement à une deuxième
RECTIFICATIF du 12 avril 2024 :
Cette première nordique est finalement une seconde mention, dans notre moitié nord du Sénégal. Une donnée nouvellement rapportée d'Observation.org sur eBird indique que trois (3) Hirondelles à ventre roux d'Afrique de l'Ouest avaient été contactées par le belge Johannes Jansen entre Mouit et le parc national de la Langue de Barbarie (PNLB), aux abords de la lagune du Lawmar (15.87, -16.51), c'était le 11 décembre 2016. Bravo à lui, à tout cocheur tout honneur !
* Entre marigot de Khant-sud, rive occidentale, et marais de Toddé (Trois-Marigots) : une (1) Hirondelle à ventre roux de la sous-espèce dite d'Afrique de l'Ouest (Cecropis semifura ssp. gordoni, West African Rufous-chested Swallow ou West African Red-breasted Swallow). A l'évidence une première donnée, avec documents qui plus est, pour la moitié nord du Sénégal, voire la première mention dans tout le (vrai) Sahel ouest-africain. Une première aussi pour Gabriel Caucal mais pas pour moi qui avais coché l'espèce il y a quelques mois dans l'Afrique... de l'Est.
21 janvier 2020. MATIN, 8h35-8h40-
A pied. Avec Gabriel Caucal.
Gabi et moi sommes sur la dune arborée d'acacias épars, dominant la cuvette du Khant-sud, en chemin pour les brousses et le marais de Toddé. Nous avons presque fini de balayer le marigot à la longue-vue et aux jumelles, bientôt survolés par les dizaines d'Hirondelles de rivage (Riparia r. riparia) du matin. Il est 8h30; et voilà que soudainement, au milieu de l'espèce hivernante décrétée la plus nombreuse dans la vallée du fleuve Sénégal apparaît une hirondelle qui a tous les aspects d'une rousse - mais laquelle ? On pense immédiatement, tous les deux, à une Hirondelle des mosquées (Cecropis s. senegalensis), quand celle-ci hélas s'éloigne, le battement d'ailes saccadé, assez rapide, entrecoupé de glissés. Pas assez lente, pas assez d'envergure, la bestiole; et généralement contactée durant la saison humide, à quelques unités, en tout cas dans la basse vallée du fleuve Sénégal. Quelques secondes d'interrogations, et de légitimes doutes. Ce qui cloche surtout, ce sont les sous-alaires; elles n'ont pas le coloris contrasté de la sénégalaise : fauve blanchâtre et quasi noir alors que la nôtre est uniformément roussâtre. Pas plus les teintes, plus claires encore, de l'Hirondelle ouest-africaine (Cecropis d. domicella), une soudano-préguinéenne normalement absente de notre Sahel; ou de toute autre hirondelle du genre Cecropis, Hirondelle rousseline méditerranéenne (Cecropis daurica ssp. rufula) comprise, celle-ci étant présente en petit nombre en cette saison, ici et là dans la région. Nous voilà donc dans l'embarras, vivement perplexes. Et c'est énervant, surtout pour Gabriel qui enrage de ne pas être fixé sur l'identité de la passagère. Car nous n'avons pas 'Borrow-Demey' avec nous, ni lui ni moi - ouh les bras-cassés (ou les prétentieux) ! Ouf, la mystérieuse daigne virevolter et repasser (cf. photo en haut de notule), quelques secondes, bien qu'au loin; une rafale de photos, la voilà dans la boîte : à défaut de planche dessinée, vérifions sur l'écran de contrôle - si les tofs délivrent quelques indications utiles à... nos connaissances mémorielles, ha ha !
Ci-dessous :
A pied. Avec Gabriel Caucal.
Gabi et moi sommes sur la dune arborée d'acacias épars, dominant la cuvette du Khant-sud, en chemin pour les brousses et le marais de Toddé. Nous avons presque fini de balayer le marigot à la longue-vue et aux jumelles, bientôt survolés par les dizaines d'Hirondelles de rivage (Riparia r. riparia) du matin. Il est 8h30; et voilà que soudainement, au milieu de l'espèce hivernante décrétée la plus nombreuse dans la vallée du fleuve Sénégal apparaît une hirondelle qui a tous les aspects d'une rousse - mais laquelle ? On pense immédiatement, tous les deux, à une Hirondelle des mosquées (Cecropis s. senegalensis), quand celle-ci hélas s'éloigne, le battement d'ailes saccadé, assez rapide, entrecoupé de glissés. Pas assez lente, pas assez d'envergure, la bestiole; et généralement contactée durant la saison humide, à quelques unités, en tout cas dans la basse vallée du fleuve Sénégal. Quelques secondes d'interrogations, et de légitimes doutes. Ce qui cloche surtout, ce sont les sous-alaires; elles n'ont pas le coloris contrasté de la sénégalaise : fauve blanchâtre et quasi noir alors que la nôtre est uniformément roussâtre. Pas plus les teintes, plus claires encore, de l'Hirondelle ouest-africaine (Cecropis d. domicella), une soudano-préguinéenne normalement absente de notre Sahel; ou de toute autre hirondelle du genre Cecropis, Hirondelle rousseline méditerranéenne (Cecropis daurica ssp. rufula) comprise, celle-ci étant présente en petit nombre en cette saison, ici et là dans la région. Nous voilà donc dans l'embarras, vivement perplexes. Et c'est énervant, surtout pour Gabriel qui enrage de ne pas être fixé sur l'identité de la passagère. Car nous n'avons pas 'Borrow-Demey' avec nous, ni lui ni moi - ouh les bras-cassés (ou les prétentieux) ! Ouf, la mystérieuse daigne virevolter et repasser (cf. photo en haut de notule), quelques secondes, bien qu'au loin; une rafale de photos, la voilà dans la boîte : à défaut de planche dessinée, vérifions sur l'écran de contrôle - si les tofs délivrent quelques indications utiles à... nos connaissances mémorielles, ha ha !
Quatre détails nous font très vite croire en la découverte d'une espèce inconnue de ce Sahel-là :
Coche pour Gabi, deuxième donnée pour moi ! Mais (ma/sa) notre première pour le nord du Sénégal : une Hirondelle à ventre roux d'Afrique de l'Ouest !- la couleur roussâtre générale y compris aux couvertures sous-alaires se vérifie
- le capuchon bleu noir descend jusque sur les joues, sous les yeux
- les brins de la queue sont incroyablement longs et flottants
- un petit rectangle blanc aux sous-caudales est bien heureusement perceptible sur l'une des photos (cf. en haut de notule)
Dès notre retour sur la berge bangotine du Djeuss, le Livre référent parle illico presto et confirme nos espoirs : c'était une (1) Hirondelle à ventre roux de la sous-espèce dite d'Afrique de l'Ouest (Cecropis semifura ssp. gordoni, West African Rufous-chested Swallow ou West African Red-breasted Swallow). A l'évidence une première donnée (avec documents qui plus est) pour la moitié nord du Sénégal, voire la première mention dans tout le (vrai) Sahel ouest-africain. Une première aussi pour Gabriel Caucal mais pas pour moi qui avais coché l'espèce il y a quelques mois dans l'Afrique... de l'Est, précisément en juillet 2019 dans les savanes humides des Queen Elisabeth (sud-ouest du pays) et Kidepo NP (nord-est), à quelques encablures des frontières de la RDC et du Sud Soudan (cf. photos ci-dessous); ici comme là-bas de la même sous-espèce gordoni ! Bref une sympathique obs. pour deux ornithos décidément bénis des dieux emplumés, en ce matin du 21 janvier 2020 (Lire et voir ICI sur Ornithondar) !
En haut :
Hirondelle à ventre roux d'Afrique de l'Ouest - Cecropis semifura ssp. gordoni
Brousses de Toddé 2020 01 21, 8h37 / @ Photo par Frédéric Bacuez, avec Gabriel CaucalCi-dessous :
Hirondelles à ventre roux (d'Afrique de l'Ouest - ssp. gordoni)
dans les savanes herbeuses du Narus Valley (Kidepo NP) & d'Ishasha (Queen Elisabeth II NP)
2019 07 14 et 07 28 & 13 / @ Photos par Frédéric Bacuez, avec Pascal Bacuez
- Cliquer sur les photos pour agrandir -
Du côté des camarades ornithos qui parcourent le pays en y laissant leurs empreintes, ce n'est pas Byzance. Faiblesse locale des effectifs de l'espèce ? Ou pression d'observations défaillante, même dans les zones que cette hirondelle atteint à la faveur de la remontée du Front Inter Tropical (FIT), pour la saison humide et de reproduction ? Bram Piot (SenegalWildlife) a contacté sa première Hirondelle à ventre roux au Sénégal à la mi-octobre 2016 près de Diembéring, en Basse-Casamance. Un juvénile immortalisé par une photo autrement plus rapprochée et séduisante que mes pauvres documents du jour. Avant de trouver une paire de ces Hirundae le 4 juillet 2019 aux abords de la forêt de Boukitingo, près d'Oussouye, toujours en Basse-Casamance. John Rose et les siens ont aperçu un petit groupe de cette espèce (sans autre information) vers la forêt de Diambour/Dialacoto, à quelque dix kilomètres du parc national du Niokolo Koba (PNNK), le 1er juin 2018. Last but not least un sujet a été observé par Miguel Lecoq au réservoir de Mbekenèr, environs de Diamniadio (région de Dakar), le 11 octobre 2019, ce qui ferait de cette donnée la plus récente et la plus proche de notre découverte nordique. Jusqu'à ce jour aussi la plus septentrionale et la plus occidentale mention de l'Hirondelle à ventre roux dans le pays (Year in Review: 2019, par Bram Piot in SenegalWildlife 2020 01 19) ! Désolé, Miguel...
Au Sahel en janvier, hors-saison et loin de là où elle devrait se trouver (avec les siens)
On aura noté que les observations précédemment citées sont toutes de la saison humide, de son installation à son repli soit de mai à fin octobre-début novembre; toutes, hormis celle du Grand Dakar, provenant de latitudes du biome soudanien que l'Hirondelle à ventre roux atteint pour s'y reproduire. Elle est ce qu'on appelle une migratrice intra africaine. Après les pluies, les Hirondelles à ventre roux refluent vers les pays du Golfe de Guinée et la zone équatoriale de l'Afrique centrale. En ce 21 janvier 2020, nous sommes au Sénégal en pleine saison sèche et notre hirondelle du matin (qui n'annonce en rien le printemps, hélas...) aurait du se trouver fort loin d'ici, et assurément pas au nord de son extension saisonnière qui ne dépasse pas le Sine Saloum (cf. carte ci-dessous). Non seulement notre observation est du Sahel mais en plus totalement hors saison ! Mais y a-t-il encore des saisons, ici comme ailleurs ? Une Huppe fasciée (Upupa e. epops), qui devrait à cette période passer l'hiver sous nos tropiques soudano-sahéliennes a été photographiée ce 22 janvier en... Bretagne (France) !
Ci-dessous :
pression d'observations dans l'ouest extrême de l'Afrique occidentale (Guinée Bissau, Gambie, Sénégal)
Flèche noire d'en haut, notre coche du 21 janvier 2020 commentée par Ornithondar (Toddé)
Flèche noire en-dessous, l'observation du 11 octobre 2019 rapportée par SenegalWildlife (Diamiadio)
Flèche noire d'en haut, notre coche du 21 janvier 2020 commentée par Ornithondar (Toddé)
Flèche noire en-dessous, l'observation du 11 octobre 2019 rapportée par SenegalWildlife (Diamiadio)
/ @ Courtesy Handbook of the Birds of the Wolrd - Alive, del Hoyo et al., 2004
En expansion vers l'est et le sud de l'Afrique. Et vers l'ouest, alors ?
Il s'en passe tout de même de drôles, chez les Hirundae africaines, depuis quelque temps... Résidente de la Guinée (sud de Conakry) au Sud Soudan et à l'Ouganda, de part et d'autre de l'équateur (voir carte ICI sur UICN), l'Hirondelle à ventre roux de la sous-espèce d'Afrique de l'Ouest (Cecropis semifura ssp. gordoni, la race nominale semifura étant confinée à quelques pays de l'Afrique australe) semble profiter de ses déplacements saisonniers en lien avec la saison humide pour conquérir de nouveaux territoires. A l'Est, son périmètre s'est étendu aux Rwanda et Burundi, ainsi qu'aux marges du Kenya et de la Tanzanie vers le lac Victoria. J'en ai trouvé un petit groupe de huit (8) sujets au coeur du Kidepo National Park, précisément dans une savane humide de la vallée du Narus, le 28 juillet 2019; cette présence dans le sanctuaire était déjà un petit gain territorial vers l'Est de la rousse conquérante. Au Sud, vers le nord de l'Angola et le centre du Congo Kinshasa. Et vers l'Ouest de l'Afrique, alors ? Faute de documentation, contentons-nous de conjectures : serait-elle devenue résidente aussi de l'extrême sud des Burkina Faso et Mali ? Plus à l'ouest autour de son bastion saisonnier de la Basse-Casamance et de la Gambie (Kanifing, West Coast, Lower River), notre hirondelle est peut-être en train d'étendre ses explorations à d'autres régions sénégambiennes (cf. plus haut et carte ci-dessus). Pour ce qui est de la Guinée Bissau, Miguel Lecoq me confie que "là-bas elle est" (devenue) "relativement commune". A l'instar de l'Hirondelle d'Ethiopie (Hirundo a. aethiopico) laquelle vers l'ouest a colonisé une moitié de l'Afrique du Golfe de Guinée, remontant au nord le fleuve Niger, s'étant installée dans la métropole d'Abidjan (Côte d'Ivoire) et faisant des apparitions remarquées vers le Libéria. Et comme l'Hirondelle de Guinée (Hirundo l. lucida), au Sénégal avant elle(s), qui s'est propagée dans tout le pays depuis les années 60' du siècle passé, et notamment ces dix dernières années, singulièrement dans la vallée sénégalo-mauritanienne de notre fleuve sahélien. Sur cette vertigineuse diffusion, on (re)lira les billets d'Ornithondar (ICI) et de Sophie Mériotte dans ses Balades naturalistes (Confirmation: l'Hirondelle de Guinée colonise un bas-delta plus favorable à son installation, in Ornithondar 2016 11 17). Car si les deux dernières espèces profitent de l'émergence d'ouvrages d'art en sites artificiels opportunément favorables à leur nidification (ponts, barrages, digues vannées, bâtiments ruiniformes pour la Lucida; buildings progressistes pour l'Aethiopico), l'Hirondelle à ventre roux bénéficierait quant à elle de l'emprise humaine sur Dame Nature et tout particulièrement des éclaircissements (!) dans la forêt tropicale - vive le déboisement ! La belle aventurière a de beaux jours devant elle; à condition toutefois que ses alliés bipèdes de circonstance lui laissent quelques insectes ailés à becqueter; ce n'est pas gagné.
Ci-dessous :
Hirondelle à ventre roux d'Afrique de l'Ouest - Cecropis semifura ssp. gordoni
Trois-Marigots, entre Khant-sud et Toddé 2020 01 21, 8h37-38 / @ Photos par Frédéric Bacuez, avec Gabriel Caucal
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