Un Percnoptère d'Egypte dans le Gandiolais - et dudit vautour dans le nord du Sénégal
Mon 3ème Percnoptère d'Egypte dans le nord du Sénégal (et dans le pays)
C'est la troisième fois*5 que je 'croise' un Vautour percnoptère dans le bas-delta du fleuve Sénégal - du jamais deux sans trois chances : un juvénile de 1ère AC en vol N/NO-S/SE par-dessus la cuvette de Khant-nord, dans les Trois-Marigots (25/12/2017 PM) ; un juvénile/immature indéterminé en vol très bas E/SE-O/NO, en 'forêt classée de Rao' (4/01/2020 PM) ; et celui-ci (cf. photos ci-dessus et en bas de notule), un 4ème AC quasi subadulte dans l'arrière-pays de Gandiole, près d'un tann asséché des ultimes Niayes septentrionales de la Grande Côte (4/02/2023 PM).
Si l'on se réfère à la nouvelle carte de distribution de Neophron percnopterus, par Botha et al. (2017), reprise dans le rapport 2022 de la Vulture Conservation Foundation (VCF,*2 cf. ci-dessous), il ne devrait pas ou plus y avoir de visiteur percnoptère sur la Grande Côte sénégalaise, de la péninsule du cap Vert aux marches du bas-delta sénégalais. Or, outre mes observations personnelles, et celle d'un sujet au parc national du Djoudj (PNOD) le 18/01/2016 (B. van Hoogstraten), plusieurs mentions (fiables) de l'espèce ont été faites ces dernières années dans le Djolof jusque sur le littoral du Gandiolais ! Au nord du 15° de latitude, sur la N2 Kébémer-Guéoul, un individu est vu le 16/01/2017 (E. Fontcuberta Trepac & D. Diaz-Diethelm) ; un juvénile est photographié le 11/11/2018 (F. Theofanopulos) ; un autre est enfin contacté le 7/02/2020 à la sortie sud de Darou Mousty (G. Dodd). Il faut ajouter à ces données deux remarquables observations de 12/2016 par Rafael Benjumea et le camarade John Wright, avec ses photos d'un sujet juvénile pourchassé par un Balbuzard pêcheur (Pandion h. haliaetus) à la verticale de la Langue de Barbarie dans le parc national du même nom (PNLB), en bord d'océan. Pour des oiseaux dont certains sont insulaires du Cap Vert et des Canaries, ou de Socotra (et n'en sortent pas), il n'y a pas de raison, si les conditions écologiques le permettent, que le Vautour percnoptère continental et migrateur ne se promenât pas sur nos confins littoraux. Même s'il abhorre les survols maritimes à l'instar de tous les grands... voiliers.
Septentrion : près d'une dizaine de mentions après 2015
Ailleurs dans le septentrion sénégalais, les mentions historiques du Vautour percnoptère proviennent de la vallée du fleuve Sénégal, du Djoudj à la Falémé vers l'est, sur les frontières mauritanienne et malienne (1964-1992, in Morel & Morel 1990 ; Rodwell et al. 1996). Sporadiques et souvent fragmentaires, elles illustrent symboliquement la chute vertigineuse de l'espèce dans la seconde moitié du XXe siècle : quasi extinction sur ses ultimes corniches de reproduction du nord-ouest africain (Maroc-Mauritanie ; Gourma malien ; Fouta Djalon guinéen ?) ; déclin drastique de ses effectifs européens et donc migrateurs à la même époque. Il faut attendre la fin des années '90, de rigoureux programmes conservatoires d'abord ibériques suivis d'encourageants regains, quoique très lents, d'une espèce encore la plus 'sensible' de tous les Vulturidés ouest-méditerranéens pour revoir quelques trans-sahariens dans les cieux hivernaux (et très risqués, lire plus bas) de l'Afrique sahélo-soudanienne, en provenance de la péninsule ibérique, de France, qui sait du Maghreb et peut-être d'Italie*.
* Espagne, 1400-1600 cc reproducteurs (accroissement global mais déclins locaux) ; Portugal, 67-90 ccr (déclin) ; France, 85 ccr (léger regain provençal mais nouveau déclin dans les Pyrénées occidentales) ; Italie, 13 ccr (regain) ; Maroc, <10 ccr (Zerhoun & Moyen-Atlas, fort déclin) ; Algérie et Tunisie, aucune donnée récente (quasi extinction) - effectif des paires reproductrices dans l'ouest méditerranéen 2018, in VCF septembre 2022*2
Avec la seconde décennie du XXIe siècle, les mentions de Neophron p. percnopterus au Sénégal s'inscrivent sans doute dans ce très léger regain des populations de la Méditerranée occidentale ; elles sont aussi le résultat d'une pression d'observation accrue sur ses terres de séjour sub-saharien (seconde partie et fin de la mousson ouest-africaine>hiver 'tropicalisé'). La brève fenêtre au Sénégal du tourisme ornithologique 'sérieux' - et pas en lien avec la pseudo-gestion cynégétique-, essentiellement anglo-saxon et espagnol et courant de décembre à mi-février, coïncide avec la (très aléatoire) probabilité d'y rencontrer un percno' au seuil de sa remontée prénuptiale*3. De 1913 à 2018, les observations les plus nombreuses au Sénégal sont majoritairement de janvier et décembre, puis de novembre et février. De la trentaine et quelque données sénégalaises les plus récentes (post-2015) rassemblées par Clive Barlow, Gabriel Caucanas, Louis Phipps & Bram Piot*1, moins d'une dizaine sont de la basse et moyenne vallée du fleuve frontalier de la Mauritanie. Des aventuriers ont été notés de la région dakaroise, et aussi loin vers le sud que les marges du parc national du Niokolo Koba (PNNK), de la Gambie (réserve de Fathala, Sénégal 2015 12) et de la Guinée Bissau.
D'autres "Trois Frontières"... Sénégal-Mauritanie-Mali
*3 Egyptian Vulture Migration 2010-2019, Vulture Conservation Foundation (VCF), Dr Evan Buechley from Smithsonian Migratory Bird Center/HawkWatch International in Vimeo.com
*4 Rapaces.lpo.fr/Vautour percnoptère/présentation, Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO, France)
*5 C'est Noël : mon premier Vautour percnoptère au Sénégal, in Ornithondar 2017 12 25
*6 Et je ne suis pas seul à nourrir quelque scepticisme : "(...) vraie réserve naturelle communautaire du Sénégal oriental. Hélas elle est rigoureusement mise en coupe réglée par les Peulhs venus du Ferlo qui massacrent tous les acacias dans l'impunité la plus complète... Les rares points d'eau permanents de la réserve sont envahis par les troupeaux ne laissant guère de chance de survie pour les quelques herbivores encore présents, et en particulier la Gazelle à front roux (une seule vue, s'enfuyant) (...)", Daniel Mignot à Ornithondar 2018 01 11.
*7 Dans l'Egypte antique, le Vautour percnoptère était vénéré, symbole de la déesse Mout et de ses valeurs maternelles protectrices
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