18, vers Gueoul, la curée : rien que des Vautours de Rüppell, avec un jeune Vautour charognard esseulé
Groupe de Vautours de Rüppell - Gyps r. rueppelli, immatures et subadultes Au nord de Gueoul entre la voie délabrée de chemin de fer et la route nationale N2 2017 06 18, 14h50 / © Photo par Frédéric Bacuez |
* Quelques kilomètres au nord de Gueoul -
APREM'-
En voiture, avec Njoko et son épouse.
Météo : 23°-29°. 13h, 28° ; 17h, 28° ; (21h, 25°)
Humidité, 75% / UV, 12, extrême / Vent du N/NO, 19 km/h
Température maximale, 36° (2008) / Température maximale moyenne, 29°
Température minimale, 21° (1991) / Température minimale moyenne, 24°
Ces 30 dernières années, il y a eu un orage, une fois...
Ci-contre : Eduard Rüppell (Allemagne, 1794-1884)
Le cadavre d'un mouton, entre la voie ferrée délabrée et la route nationale. Alentour, seize (16) Vautours de Rüppell (Gyps rueppellii, Ruppell's Griffon Vulture), immatures et subadultes, le cou rougissant d'excitation (cf. photos ci-contre). Et dans l'arbre au balcon, un (1) Vautour charognard (Necrosyrtes monachus, Hooded Vulture, cf. photo ci-dessous) ; juvénile, tout seul. Deux espèces de Vulturidés récemment passées du statut 'En danger' à 'En danger critique d’extinction' (2015), sur la désespérante Liste rouge des animaux en voie de disparition dressée chaque année par l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) en association avec BirdLife international. Ici c'est véritablement encore un de leurs coins, un des rares sites dans toute l'Afrique de l'ouest où l'on est à peu près assuré de les rencontrer, à table en bord de route. Vers Louga et Gueoul, aux confins du Njaambur et du Djolof. Dès qu'un animal domestique se fait buter par un véhicule roulant à tombeau ouvert sur la N2, ils rappliquent bientôt. D'où, on ne le sait pas vraiment. On suppose seulement qu'il doit bien y avoir dans la région un bosquet de grands arbres (dortoir et/ou nichoir) ayant divinement échappé à la cognée des charbonniers. Ou au pillage par les margoulins nigérians et associés qui écument désormais toujours plus loin l'Afrique occidentale pour dénicher ou attraper des vautours. L'offre doit répondre à la demande exponentielle, c'est la rançon de l'émergence : nos nouvelles classes consuméristes tremblent de tout perdre de leur développement personnalisé sans avoir suffisamment goûté aux délices de la mondialisation. Allez, hop un vautour dans la marmite, une décoction, un organe ou la cervelle de la bête sous la dent et la protection mystique devrait être des plus solides ! Une défaillance, une migraine, une épilepsie, une maladie incurable ? Plumes, ossements, crânes, poudres de vautour, il n'y a rien de tel pour se protéger de tous les maléfices du monde moderne, des anciennes comme des nouvelles épidémies ; des malveillances de toutes sortes : les fameux jaloux !...
En terres sahéliennes d'Islam - Dieu et saints sont grands- on ne mange pas de cette mystique-là. Ce qui n'empêche pas que les vautours ont été extirpés de la quasi totalité des quelques reliefs faits de falaises et de pitons sur lesquels ils nidifiaient - au Mali et au Nigeria à coup sur, drastiquement au Niger, au Burkina Faso, au Bénin etc. (in Jean-Marc Thiollay, 2006). Dans le cas du Vautour de Rüppell, il a fallu attendre mars 2010 pour découvrir des nidifications sur Balanites aegyptiaca, dans la réserve de faune de Gadabedji (Niger). Et février de la même année quand Wim Mullié a observé la nidification d'un couple de Vautours de Rüppell sur un Maerua crassifolia de notre région septentrionale du Sénégal. Ceci expliquerait peut-être cela. Et mériterait bien un inventaire exhaustif de la zone sylvo-pastorale au sud-ouest du lac de Guiers ainsi que des brousses de la vallée fossile du Ferlo. On savait déjà que plus au sud les bestieaux occupaient aisément les baobabs pour y coincer leur nid, parfois tout près des Pélicans gris et Tantales ibis qui se servent du 'patrimoine' comme reposoir/dortoir. Mais au nord, la documentation manque encore...
Chiche pour une expédition dédiée - Ornithondar est partant ! Et il y a urgence... Du côté mauritanien, d'abord ; au sujet de Gyps rueppellii Paul Isenmann est expéditif : "pas d'observation récente en Mauritanie" (in Oiseaux de Mauritanie, p. 119-120, 2010). Dans notre région du nord-ouest sénégalais, cela fait un petit moment que je note nettement moins le Vautour oricou (Torgos t. tracheliotos) qui fréquentait les environs de Louga, même si nous l'avons observé début juillet 2016 planant au-dessus des dunes au-delà du 3e des Trois-Marigots. En l'absence de l'oricou, chef incontesté de la curée, et lorsque l'impérialiste Vautour fauve est momentanément bouté hors du pays, ce sont les grégaires Rüppell qui prennent les premières places au banquet. Quand au tristounet V. charognard de l'après-midi (cf. photo ci-dessous), si je pense aux centaines de ces éboueurs urbains qui peuplaient la moindre ville, le moindre village, et leurs marchés, dans ma jeunesse, je pleure... Pourtant rien n'a vraiment changé, en Afrique de l'ouest, quant à l'insalubrité ou la disponibilité en cadavres et dépouilles à nettoyer... On peut même dire que de ce côté-là, ça pullule, au Sénégal !
On ne le répétera jamais assez :
" hors les réserves virtuelles et les parcs nationaux, déjà peu nombreux et fort mal conservés,
98% des vautours ont disparu de l'Afrique de l'ouest en moins de 30 ans ! "
- Frédéric Bacuez in Ornithondar 2017 03 30
Nota 1 : de tous les Vulturidés soudano-sahéliens, le Vautour de Rüppell est le plus disposé à fréquenter les bordures sahariennes ainsi que les montagnes, même hautes. Paul Isenmann rapporte que ce vautour était en Mauritanie très régulièrement observé "dans la région de Rosso et vers le nord jusqu'à Nouakchott dans les années 1972-1974 et à Nouadhibou dans les années 1978-1983", notamment pendant la saison des pluies (in Isenmann et al., 2010). Ces dernières années, fait nouveau présageant peut-être d'une installation à venir dans le bassin méditerranéen occidental, des observations du V. de Rüppell ont été faites dans les Baronnies, le Verdon et les Grands Causses de France (mars 2016). Tandis que nos camarades marocains (in Rachid el Khamlichi, Mohamed Amezian) et espagnols rapportent des franchissements du détroit de Gibraltar, dans les deux sens, de plus en plus réguliers. L'oiseau est peut-être aidé dans ces sauts-de-puce par ses incroyables facultés à voler aux altitudes les plus extrêmes, au-delà de 10 000 mètres même si sa moyenne est de 3 500 mètres. En 1973 à Abidjan (Côte d'Ivoire), un Vautour de Rüppell avait percuté un avion à plus de 11 000 mètres d'altitude !
Nota 2 : Eduard Rüppell (Allemagne, 1794-1884 - cf. photo ci-dessus en médaillon) est le premier naturaliste à avoir pu traverser l'intégralité de l'Abyssinie, d'est en ouest. De ce voyage, il a rapporté d'innombrables descriptions (532 espèces !), et une collection incomparable de dessins et de spécimens de la flore et de la faune aujourd'hui exposés au Muséum de Francfort, sa ville natale. On lui doit un remarquable livre de taxonomie sur les oiseaux de l'Afrique du nord-est, publié en 1845. Plusieurs espèces du règne animal portent aujourd'hui son patronyme : outre le Vautour de Rüppell (Gyps rueppellii), une fauvette (Curruca ruppeli) et un renard (Vulpes rueppelli), entre autres.
Nota 2 : Eduard Rüppell (Allemagne, 1794-1884 - cf. photo ci-dessus en médaillon) est le premier naturaliste à avoir pu traverser l'intégralité de l'Abyssinie, d'est en ouest. De ce voyage, il a rapporté d'innombrables descriptions (532 espèces !), et une collection incomparable de dessins et de spécimens de la flore et de la faune aujourd'hui exposés au Muséum de Francfort, sa ville natale. On lui doit un remarquable livre de taxonomie sur les oiseaux de l'Afrique du nord-est, publié en 1845. Plusieurs espèces du règne animal portent aujourd'hui son patronyme : outre le Vautour de Rüppell (Gyps rueppellii), une fauvette (Curruca ruppeli) et un renard (Vulpes rueppelli), entre autres.
A lire, sur Ornithondar :
Vautours du Njaambur : le spectacle fait illusion, hélas il s'éteint à petit feu..., 2017 03 30
Par ailleurs (nord Kenya), en complément :
Into a Vulture Lover’s Paradise, par Darcy Ogada pour 'The Peregrine Fund', in Explorers Journal & National Geographic 2017 06 23
Tandis qu'autour du Djebel Moussa (Maroc) et du détroit de Gibraltar, le recensement printanier de la migration des vautours et grands rapaces s'achève. Contributions multiples et coordination transfrontalière efficace, tout pour faire rêver l'esseulé Ornithondar du Sahel sénégalais...
Recensement des vautours 2017 dans le détroit de Gibraltar (Maroc-Espagne), par Rachid el Khamlichi, in Facebook
Ci-dessous et en bas de notule :
sous l'oeil attentif d'un jeune Vautour charognard,
groupe de Vautours de Rüppell à proximité d'un ovin fraîchement mort (renversé par un véhicule ?)
Entre l'ancienne voie de chemin de fer Dakar-Saint-Louis et la route nationale N2, au nord de Gueoul
2017 06 18, 14h49 / © Photos par Frédéric Bacuez
Vu (liste non exhaustive) :
- Héron gardeboeufs (Bubulcus i. ibis, Cattle Egret)
- Vautour charognard (Necrosyrtes monachus, Hooded Vulture - Critically endangered/CR-En danger critique, statut 2015, sur la Liste rouge de l'UICN des espèces menacées de disparition), 1 ind. juvénile dans un arbre, au-dessus d'un groupe de Vautours de Rüppell au sol [nord de Gueoul]
- Vautour de Rüppell (Gyps rueppellii, Ruppell's Griffon Vulture - Critically Endangered/CR-En danger critique, statut 2015, sur la Liste rouge de l'UICN des espèces menacées de disparition), 16 ind. autour d'un bouc mort [entre l'ancienne voie de chemin de fer et la route nationale, au nord de Gueoul]
- Milan d'Afrique à bec jaune / noir (Milan parasite, Milvus -aegyptius ssp.- parasitus, Yellow-billed Kite / Milvus migrans migrans, black kite), absent au nord de Mekhe, devenant de plus en plus fréquent en progressant vers Dakar - et innombrable à partir de Thiès et tout particulièrement dans la péninsule du Cap Vert
- Tourterelle masquée (Tourterelle à masque de fer, Oena c. capensis, Namaqua Dove), 1 ind. en vol passant
- Tourterelle maillée (Spilopelia s. senegalensis, Laughing Dove)
- Rollier d'Abyssinie (Coracias abyssinicus, Abyssinian Roller), 1 ind. perché sur le fil
- Calao de Kemp (Tockus kempi, Western Red-billed Hornbill), quelques ind.
- Cochevis huppé du Sénégal (Galerida cristata ssp. senegallensis, -Senegal- Crested Lark)
- Corbeau pie (Corvus albus, Pied Crow), de plus en plus commun au fur et à mesure qu'on progresse vers le sud et la péninsule du Cap Vert
- Choucador à oreillons bleus (Lamprotornis c. chalybaeus, Greater Blue-eared Glossy-starling), plusieurs ind.
- Choucador à longue queue (Lamprotornis caudatus, Long-tailed Glossy-starling), 2 ind.
- Choucador à ventre roux (Lamprotornis pulcher, Chestnut-bellied Starling), l'oiseau le plus fréquent sur le bord de la route [N2]
- Moineau doré (Passer luteus, Sudan Golden Sparrow)
- Alecto à bec blanc (Bubalornis albirostris, White-billed Buffalo-weaver)
Dure destinée aujourd'hui que celle de ces nettoyeurs... Image négative du charognard, pressions des intérêts économiques en tous genres (xalis...), et puis "en bout de chaîne alimentaire" ils sont victimes de toutes les merdes ingurgitées par leurs proies, des polluants, des plastiques bouffés par les chèvres, premiers éboueurs des villes sénégalaises...
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