1, de la huppe chez les Soufis...
* Nord du Sénégal -
" Contente-toi de savoir que tout est mystère :
la création du monde et la tienne,
la destinée du monde et la tienne.
Souris à ces mystères comme à un danger que tu mépriserais..."
- In 'Rubaiyat', par Omar Khayyãm, algébriste, astronome, philosophe et... libertin (Perse, Xe siècle)
C'est Ramadan, comme chacun sait. Alors communions ici avec nos hôtes sénégalais par cette parenthèse culturelle comme un plumeau dont seuls les rares impies, niaks et toubabs, n'auront jamais eu vent; je suis en effet persuadé que nos talibés d'Allah seront heureux de redécouvrir, alanguis sur les nattes au beau milieu des places de déchets et des ruelles de sable sous les prosopis torturés, dans la pesante moiteur asthénique de la mousson, les éternelles richesses d'un Islam soufi qui les habite jour et nuit, surtout la nuit : les abysses spirituels de la Qarawine ou d'Al Azhar, certes, mais aussi l'oeuvre bachique du bagdadi Abû-Nuwâs ('Le vin, le vent, la vie', aye !), la poésie amoureuse du cairote Mouhammad al-Nawâdjî ('La prairie des gazelles', en l'occurrence plutôt 'des gazous', ouh la la !), les tourments sirupeux de la diva Oum Khalsoum et d'Abdelwahab, les transes du pakistanais Nusrat Fateh Ali Khan, la grace des derviches ottomans, 'Le destin' de Youssef Chahine.
Ci-dessous : huppe fasciée ssp. epops, à Bango, 2008 04 / Détail, courtesy photo par Philippe Boissel, tous droits réservés

EXTRAIT :
" [au hibou] La huppe lui dit : 'Ô toi qui es ivre de l'amour des richesses ! supposons que tu parviennes à trouver un trésor; eh bien ! tu mourras sur ce trésor, et ta vie se sera ainsi écoulée sans avoir atteint le but élevé qu'on doit se proposer. L'amour de l'or est le propre des mécréants. Celui qui fait de l'or une idole est un autre Tharé*. Adorer l'or, c'est de l'infidélité; ne serais-tu pas par hasard de la famille (...) qui fabriqua le veau d'or ? Tout coeur qui est gâté par l'amour de l'or aura la physionomie altérée, comme une monnaie fausse, au jour de la résurrection' "
* Tharé ou Azur, père d'Abraham, idolâtre et adorateur du feu, selon les musulmans qui, au Sénégal, ne le sont évidemment pas...
"Physionomie altérée" ? Quand je vois la gueule (de hibou) de certains marabouts et de leurs soumis avant même leur hypothéquée résurrection, je me dis que la huppe a bien des pouvoirs... au Sénégal, pour se moquer ainsi des imposteurs apostats repus d'ignorance qui roulent en Hummer*, avec l'argent de leurs oiseaux faméliques...
* 4x4 au carré et bas de plafond (?), ancien fleuron néo militaire de la General Motors américaine en faillite, hors de prix, insatiable d'essence et grande pollueuse devant l'Eternel; aujourd'hui rachetée par les Chinois, ne valant donc plus un wuan ! Mais chut, laissons la huppe se gausser de ces parvenus has been du continent... Le monde, se laissent-ils griser, est en extase... du Ferlo à Pikine, leur petit, tout petit monde, hébété...


Ci-dessus :
- à g., 'Le Symorg', peinture acrylique et crayons / Par mon fils Inoussa dit Inno, artiste plasticien, 2008, droits réservés
- à d., autour de la huppe fasciée, 'La conférence des oiseaux', par Habib Allah
Voilà un livre remarquable, que j'ai parcouru il y a bien longtemps et que je veux relire car je me suis toujours demandé pourquoi 'mes' insulaires tanzaniens (pas tous mais quelques marginaux)avaient une telle passion pour les oiseaux (sachant que l'Iran a eu une lointaine influence dans la région). Il faut que je retrouve des enregistrements(j'en ai tellement)de vieux imitant le dialogue du bulbul et de l'écureuil : c'est truculent de drôlerie ! Un peu comme les Histoires naturelles de Jules Renard...
RépondreSupprimerA plus. Pascal
bonjour,
RépondreSupprimersous le soufi, le père! il semble avoir du caractère, votre fils peintre, trempé comme le votre dans l'encre du savoir, cette toile me plait puis elle est percutante. Une huppe comme celle sur votre photo vient souvent cette année "brouter" dans mon jardin