Adieux : vole, maintenant, tonton Aïdara !
* Bango -"Ici on est loin du bruit", susurrait-il, ce 3 novembre 2011, heureux, allongé à la maure sous un Salvadora persica, sur un tertre face aux étendues assommées de soleil sahélien.
C'est au Mexique que j'ai été informé le 14 décembre du décès de Cheikh alias "tonton" Aïdara. A la fin des années 2000, le complice 'artiste ésotérique' de mon grand Inno, tous deux marginaux de leur société respective très conformiste, était devenu aussi mon camarade de jeux naturalistes. On en fit, ensemble, de bien belles. A ausculter les dépouilles des Ardéidés tués par le Pygargue vocifer ou l'Aigle de Bonelli ; à inventorier les oiseaux de toute la plaine alluviale, de Diama à Bango, vingt-trois kilomètres de bourbiers, de steppes, de bolongs et de... cagnard. A rechercher les restes et leurs breloques géo-satellitaires des balbuzards écossais ou gallois Joe et Leri. Et à faire découvrir nos brousses, lagons et fleuve à quelques visiteurs éprouvés mais ravis, jeunes et moins jeunes, d'ici et d'ailleurs - je pense notamment à la copine Rozenn tout juste rentrée du Botswana et à qui je viens d'apprendre la triste nouvelle. Une bien belle période avant que près de Rao, à quelque tire-d'aile de balbu' sur la route nationale une voiture avait fauché notre ami, condamné jusqu'à la fin à ne plus pouvoir marcher, avec moi, dans notre monde des êtres de la Vie, avec ses mystères, qui l'enthousiasmait tant. Pas par hasard que le regretté Charles Camara, professeur au célèbre prytanée militaire de Bango, et tant d'autres, enseignants, élèves, artistes, buveurs de thé et fumeurs d'herbes ensorcelantes étaient des aficionados de sa petite casemate comme un bric-à-brac où Tonton Aïdara conservait tout, des livres, des cailloux, des plumes, des objets récupérés ; et des toiles picturales rongées par le sable et le temps. Ah oui, notre ami fut le premier à Bango à s'intéresser à la problématique des déchets et à initier un éphémère site de tri et compostage villageois - ce qui lui valut bien des inimitiés... Adieu, Cheikh, on se reverra lors de ma migration finale : et plus besoin de jambes, tu voles, désormais ! Comme picci...
Cheikh 'tonton' Aïdara, l'Ornithondar et leurs camarades
Basse vallée du Sénégal 2011 & 2012
/ @ Photos archives Rozenn Le Roux et Frédéric Bacuez
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