30, carnet rose: les Touracos gris ont un Hocco, je veux dire un petit !

Touracos gris - crinifer piscator, adulte et juvénile (à g.)
A travers la fenêtre-moustiquaire dans le jardin bangotin 2016 07 30, 15h15 / © Photo par Frédéric Bacuez

* Bango, Impasse Gustave Pelloux -

Le 30 juillet dernier, premières aventures hors du nid pour un juvénile de Touraco gris (crinifer piscator, western grey plantain-eater), encadré par des parents très attentionnés. A défaut de voir d'autres gros bébés, on en déduira que ce dindonneau est le survivant d'une ponte de deux ou trois œufs déposés dans un nid ressemblant à s'y méprendre à une aire de rapace mais constituée de fines brindilles. Dans un bel arbre bien feuillu, entre six et quinze mètres de hauteur. Le petit me fait furieusement penser à un Hocco guyanais: même aspect dégingandé, même profil disgracieux, et des mœurs similaires (et semblable goût prononcé pour les fruits). 
Comme toujours avec les Touracos (et les Hoccos !), c'est le ramdam qu'ils font partout où ils passent qui attire l'attention: gloussements, ricanements, cris, bruits d'ailes, mouvements maladroits dans la canopée, chutes des gousses et fruits arrachés aux arbres qu'ils aiment visiter - ficus, manguier, sapotillier, goyavier, palmier, tamarinier, jujubier, et même neem et cordia urbains: de vrais gourmands, qui gaspillent beaucoup ! Le trio du jour est installé sur une grosse branche horizontale du vénérable prosopis qui surplombe la maisonnette. Pour l'heure, le petit-à-sa-maman observe avec curiosité le monde qui s'agite, au bas de l'arbre... Las, môman est aux petits soins, tout le temps en train de lui coller au train, l'épouillant, lui faisant toilette tandis que pôpa convoie régulièrement quelque friandise, la becquée réorientant illico l'attention de l'oisillon, pour quelques minutes... Repu, le jeune protégé pique rapidement du bec, on peut voir le corps qui bascule de l'avant à intervalles réguliers, sur la branche; c'est l'heure de la sieste, les parents vont souffler, les voilà qui se positionnent chacun sur leur branche, pour veiller, et cligner un peu des yeux...
Vers quinze heures, la famille se décide enfin à descendre des cimes... C'est un événement car s'ils sont fort maladroits dans la frondaison, les Touracos gris rechignent à chercher pitance au sol. Sauf, peut-être, s'il faut éduquer sa progéniture et lui apprendre à décortiquer un fruit tombé... C'est le cas, cet après-midi: il y a, dans le sable, des gousses jaunes de prosopis, et des sapotilles noircies relâchées nuitamment par les Epomophores de Gambie et les Roussettes paillées. Très vite cependant, il faut que les Touracos retrouvent un perchoir, en l'occurrence une table et des chaises, sur la terrasse. Avant que de remonter dans le vieil arbre. Et s'éclipser, à la queue leu leu, en silence cette fois.

Nota: le Touraco gris (crinifer piscator) n'a pas le plumage coloré de ses cousins le Touraco vert (tauraco persa) et le Touraco violet (musophaga violacea), deux espèces fréquentant les forêts-galeries des latitudes soudano-guinéennes, et présentes dans le sud du Sénégal. Avec les Tchitrecs (bleu, d'Afrique, à ventre roux), le Touraco violet était l'un de mes émerveillements, jadis, dans les ripisylves du Nazinon burkinabè, aux marges du Ghana. Les Touracos gris sont des oiseaux savanicoles largement répandus et plutôt communs, en Afrique subsaharienne dès le sud de la Mauritanie. On les trouve dans les agglomérations urbaines parfois plus aisément qu'en brousse... Normal: il y a bientôt plus de grands arbres touffus dans la cité que dans la nature ! Même si le Touraco gris est en mesure de parcourir de longues distances pour rejoindre son repaire, il n'en reste pas moins que dans notre Sahel où les hauts fûts deviennent des exceptions, l'abattage systématique de tout ce qui fait plus de cinq mètres étant la règle du charbonnier qui ne chôme pas, Crinifer piscator est à terme menacé, sauf à trouver refuge en ville... Territorial, monogame, fidèle, le couple de Touracos gris est particulièrement bruyant pendant la saison nuptiale (janvier-juillet, parfois août et même en octobre, in Dates de reproduction des oiseaux de Sénégambie, par Morel & Morel, 1982): leurs gueulantes n'ont alors rien à envier aux vociférations des Pygargues (haliaeetus vocifer) !

Ci-dessous:
quatre Touracos gris en plein concert...
 Dakar-Almadies, Sénégal 2015 12 19 / Courtesy © enregistrement sonore par Bram Piot pour Xeno-Canto




Derrière la fenêtre-moustiquaire, dans le jardin bangotin...
Ci-dessous:
Un début d'après-midi avec la famille Touraco gris - crinifer piscator, parents et progéniture...
Jardin bangotin 2016 07 30 aprem' / © Photos par Frédéric Bacuez
- Cliquer sur les photos pour agrandir -
 

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Galerie photos : le Traquet de Seebohm, du Maroc au Sénégal

Hyaenidae: appel à témoins...

Adieux : vole, maintenant, tonton Aïdara !