12, engoulevent d'Europe et petit-duc scops dans le sous-bois - il a l’œil ornitho, notre chiroptologue !

* Plaine alluviale. Ripisylve à gonakiers -

Avec Matthieu Cupillard, et Emmanuel Cosson (GCP*/France)

Docteur en biologie animale, directeur du Groupe Chiroptères de Provence (GCP): http://www.gcprovence.org/

APREM', ~16h30-

Dans le sous-bois touffu de la ripisylve à gonakiers (acacias niloticas) et tamaris (tamarix senegalensis) en partie inondée. Fouillis végétal ombreux et tas de branchages morts au sol, partout:

A la recherche de deux engoulevents à longue queue locaux - un mâle et une femelle - levés quelques minutes plus tôt, c'est un engoulevent d'Europe - Manu voit bien les deux carrés blancs de la queue -, et aussitôt un petit-duc scops, rares hivernants venus du Maroc et/ou d'Europe qui s'envolent à leur tour du sol. Le hibou, d'abord repéré par Manu, est à nouveau débusqué, par Fred, grace aux nombreux petits oiseaux (dont les tisserins) qui l'avaient bien repéré et le houspillaient vigoureusement.

- Le petit-duc scops (d'Europe, otus scops, european scops owl) est avec le hibou des marais (asio flammeus, short-eared owl) l'un des deux petits hiboux du paléarctique qui peut passer son hiver sous les tropiques africaines. Il est vrai que de nombreux individus des deux espèces ne franchissent pas le Sahara: le petit-duc peut hiverner dans les pays du bassin méditerranéen *; le hibou des marais peut atteindre la façade atlantique du Maroc mais beaucoup restent en Europe moyenne, si les rigueurs de l'hiver le lui permettent. Néanmoins, le petit-duc scops demeure le seul rapace nocturne d'Europe *1 majoritairement migrateur. A l'est où ses effectifs sont plus importants *2  qu'à l'ouest *3 -avec un déclin significatif partout, notamment en Suisse, Italie et Turquie -, il gagne l'Afrique tropicale, du Tchad à l'Ethiopie et le kenya. A l'ouest, il rejoint notre continent par le détroit de Gibraltar (août-septembre) et arrive en Afrique occidentale début octobre sur des quartiers d'hiver fragmentés - qu'il aura quittés en avril-mai, dans le sillage des hirondelles. Au Sénégal par exemple, on n'aura guère l'occasion de le rencontrer en dehors du delta du fleuve Sénégal, à l'aval de Richard-Toll.

Le petit-duc scops est un hibou de très petite taille -19 à 20 cm maximum. Essentiellement nocturne, il passe le jour à couvert, immobile contre un tronc ou une grosse branche, dans une cavité d'arbre ou de muraille, voire directement au sol dans un tas de feuilles ou de brindilles où son plumage mimétique se confond parfaitement. Loin de fuir l'Homme, on le trouve régulièrement dans les villages, et le bruit ne semble pas l'importuner - il a de la chance.... La nuit, le petit-duc est très actif, rapide, vif voire vindicatif: il chasse en vol et au sol, des insectes orthoptères, des arachnides, des mille-pattes, vers, lézards, grenouilles et quelques petits passereaux. L'utilisation des pesticides, la destruction de ses terrains de chasse, l'abattage des vieux arbres ont entrainé un net déclin du petit rapace, tant sur ses sites de nidification que dans ses quartiers d'hiver; dans le delta du Sénégal, l'usage par dispersion des anti acridiens et autres produits phytosanitaires sur les rizières ou les champs de canne à sucre peut nuire aux effectifs du rapace.

* Sud de l'Espagne, nord du Maroc, îles méditerranéennes, sud de l'Italie et Grèce.
*1 De 200 000 à 400 000 couples pour toute l'Europe, Russie y compris.
*2 Russie: 80 000 couples au minimum; Turquie: 20 à 40 000 couples.
*3 Espagne: 30 à 35 000 couples mais seulement 3000 à 12 000 couples en France ( moins de 10% des efectifs nicheurs en Europe).


Ci-dessus: engoulevent d'Europe sur ses quartiers d'hiver en Afrique du Sud, 1998 01 / © Photo par Gordon Holtshausen, pour African Bird Club


- L'engoulevent d'Europe (caprimulgus europaeus, eurasian/european nightjar) est un hivernant encore plus problématique à observer dans notre delta: d'abord parce que l'oiseau nocturne y est beaucoup plus discret et timide que l'autochtone engoulevent à longue queue (caprimulgus climacurus, long-tailed nightjar) avec lequel il partage souvent l'habitat diurne. Il est possible aussi que les engoulevents authentiquement européens ne font que passer, par ici, et rejoignent des quartiers d'hiver plus sudistes; il semblerait d'ailleurs que les sujets collectés dans notre région soient des engoulevents maghrébins de la sous-espèce meridionalis - essentiellement du Maroc (cf. Morel & Morel, 'Les oiseaux de Sénégambie', citation de 1975 11 2).

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